Je ne suis pas près de l’oublier, cet Ultra Trail du Vercors 2017. Cela faisait si longtemps que je voulais m’y frotter. Au final, j’ai donc été victime de conditions défavorables où il apparaît « normal » d’avoir dû arrêter comme me l’ont dit de nombreux proches. Certes. Mais j’ai eu besoin de prendre du recul pour « digérer » toute cette aventure qui aura duré plusieurs mois. Avec en fil rouge, l’éternelle question : pourquoi m’être lancé dans un tel défi ?
Réécrire la fin de l’histoire ?
La nuit approche et la pluie a cessé de tomber. J’ai toujours aussi mal sur le côté de la cuisse, je n’arrive plus à m’alimenter mais qu’importe… Il ne me reste plus que quelques centaines de mètres avant de rallier l’arrivée à Villard-de-Lans. Cela fait déjà plusieurs kilomètres que je suis ailleurs. Que je repense à tous les efforts mais aussi les très beaux moment vécus pour en arriver là. Je vais savourer ces derniers mètres, vivre l’instant présent au maximum. Je vois la ligne d’arrivée au loin… mais qui est là ? Mon fils et ma femme ! Comment ont-ils fait pour être là ! J’arrive à leur hauteur, je les serre dans mes bras et je ne peux retenir quelques larmes. Malgré la douleur, je décide de porter mon fils sur mes épaules sur les derniers mètres. Le temps s’arrête et je suis sur une autre planète…
L’histoire aurait pu se terminer ainsi. Plus je réfléchis et plus je me rends compte qu’un élément aurait pu me faire changer d’avis à Saint-Nizier : savoir à ce moment-là que ma femme allait m’attendre à l’arrivée avec mon fils. Même en grelotant et en ayant attendu plus de 30 minutes dans le froid, je crois que cela aurait créé un déclic. Je ne dis pas que cela aurait été raisonnable mais j’ai acquis la certitude au fond de moi que cela m’aurait donné la force.
Rien que de le savoir après coup (c’était une surprise) me donne une pointe de regret mais me rappelle aussi la puissance du mental. C’est aussi pour ça que je cours : partager ces moments forts avec ceux que j’aime.
Mais si je revis la même situation, je l’appréhenderai différemment et je ferai preuve de davantage de lucidité. Dans le doute, je me concentrerai sur mon ravitaillement et je ferai tout pour rester chaud quitte à continuer de trottiner 15 minutes sous la pluie ! ça m’arrivera peut-être à nouveau une course brutalement interrompue même si c’est rare que ce soit aussi longtemps.
Fort dans l’adversité
L’épilogue ne doit pas faire oublier que j’ai quand même souffert (raisonnablement) durant une bonne partie de la course. Je m’apprêtais ainsi à aller au bout en ressentant une douleur assez vive, mais supportable, durant près de 10h ! L’expérience du trail des templiers m’a aidé à faire face même si j’ai eu un moment de flottement vers Méaudre.
Mais le moment le plus marquant restera cette troisième partie de course où j’ai affronté l’envie de dormir, le froid, la pluie, un terrain difficile. Je suis passé d’une forme de léthargie à une situation de réveil avec une motivation grandissante. Je savais qu’on pouvait passer de la défaillance à l’euphorie lors d’un ultra trail et je l’ai donc réellement vécu.
Pour finir, ce que retiens de ces moments-là, c’est que je n’ai jamais songé à abandonner. Mais pas uniquement par refus de l’échec : je me suis dit que je prenais quand même du plaisir à faire tout ça !
Une approche des objectifs à revoir
Avec le recul, je crois que cet objectif a pris un peu trop de place dans mon esprit. C’était dans un coin de ma tête depuis si longtemps… Les premiers jours suivants la course ont été un peu difficiles après une telle implication mentale. Évidemment, je n’aurais peut-être pas la même analyse si j’étais aller au bout. Et cela s’explique aussi par mon choix de participer à un seul trail cette année en raison de mes contraintes familiales.
Mais je pense que pour la suite, je vais essayer de limiter un peu plus la place qu’un objectif prend dans ma tête. Peut-être vais-je moins miser sur une seule course quitte à arriver un peu moins au top sur chaque objectif.
Le gros point positif, c’est que j’ai pris beaucoup de plaisir lors des nombreuses heures d’entraînement et ça n’a jamais été une corvée. Je garde ainsi des belles images et un excellent souvenir de cette longue préparation. Je vais continuer de m’appuyer sur cet état d’esprit.
Prendre le temps de repartir
J’ai maintenant envie de prendre mon temps pour me relancer en quête d’objectif tout en gardant une bonne hygiène de vie. Je vais trouver des petits objectifs à court terme qui demandent peu d’énergie mentale.
Je veux surtout continuer de partager mes aventures, ma passion. L’engagement auprès de Peace and Sport a été une révélation. Je souhaite que ma passion puisse servir d’autres causes et m’aider à continuer à créer du lien avec les autres.
« Pour aller de l’avant, il faut prendre du recul car prendre du recul c’est prendre de l’élan ».
Belle analyse, et la question du pourquoi reste bien la base pour se lancer dans un ultra. C’est la partie la 1ère étape du processus, prendre un peu de temps avant de s’inscrire pour être au clair avec soi, avec sa famille, avec ses contraintes. Le jour de la couse, il faut gérer les imprévus, et c’est que tu as très bien réussi dans des conditions climatiques compliquées (n’oublie pas les hypothermies qu’à dû gérer l’organisation).
Bon prochain objectif
Franck d’objectiftrail.com
Bonjour Franck. Merci pour ton message et sympa ton blog 😉 A une prochaine.